Objectif réanimation à Kabinda
Luc Babando, Infirmier Suisse en soins intensif, médecine, urgences.
Florence Scuderi, Infirmière Suisse en pédiatrie, urgences, néonatologie.
Introduction
C’est en mars 2018 que commença pour nous l’expérience Kabinda. En nous inscrivant à la formation de médecine tropicale d’Anvers (Belgique), nous étions loin de nous douter que la rencontre avec la Sr Manuella allait nous mener jusqu’au fond de la RDC. Six mois après le début de la formation en Belgique, nous nous envolions pour trois jours de voyage direction Kabinda. Dans l’avion nous préparions déjà l’ébauche de la formation de réanimation que nous avions pour mission de mettre en place durant notre séjour.
Corps du projet
C’est durant les échanges en vidéoconférence avec Sr Manuella que le projet d’apporter une formation continue à l’Hopital Général de Référence de Kabinda est né. En effet, étant tout deux infirmiers de formation depuis déjà plusieurs années dans des services de soins aigus (soins intensifs pour Luc et pédiatrie pour Florence) l’idée d’apporter quelques choses de concret dans le domaine de la réanimation aux infirmiers de l’HGR nous a plu. L’objectif principal était donc la formation de tous les infirmiers aux gestes de réanimation (massage cardiaque et ventilation) sur mannequin. Pour ce faire, Luc à sacrifié un de ses bagages en soute pour emporter « Monsieur Ponctuel » avec nous jusqu’au Congo.
Réfléchir avant d’agir
Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous avions été prévenus qu’il nous faudrait un peu de temps pour évaluer le type de formation possible et la manière la plus adéquate de la donner. Cet avertissement avisé a été notre premier défi. En effet, il nous a fallu plus d’un mois pour bien comprendre la structure de l’hôpital, sa hiérarchie, ses codes. Nous avons dû d’abord apprendre de tous ces soignants, avant de nous lancer dans la mise en place d’une formation. Apprendre à soigner différemment, apprendre à se faire comprendre dans nos termes / notre manière de parler tout simplement. Comprendre que les codes sont différents de chez nous était indispensable pour rejoindre les soignants que nous avions à cœur d’accompagner dans leur pratique.
Mise en place du projet
Après 2 mois sur place, nous nous sentions enfin prêts pour mettre en place notre projet. Nous avons commencé par préparer le contenu de la formation et discuter avec les personnes sur place de la manière la plus faisable de procédé. Il nous a fallu rencontrer les différents responsables infirmiers et médicaux afin de faire valider notre programme de formation continue. La formation, qui se voulait plutôt pratique que théorique s’est déroulée en petit groupes : 5-8 infirmiers afin que chacun puisse suffisamment pratiquer les gestes sur le mannequin. Nous avons pu apporter quelques éléments de rappel concernant l’approche du patient en arrêt cardio-respiratoire et l’intérêt de la bonne pratique des gestes du massage cardiaque et de la ventilation artificielle. Il nous a fallu 3 semaines pour que 95% des infirmiers puissent bénéficier de la formation. Au total 80 infirmiers et infirmières ont pu participer à 2h de formation continue et pratiquer la réanimation sur mannequins. Si l’organisation était parfois complexe et que les sessions n’ont que très rarement commencé à l’heure, la satisfaction de voir les soignants participer et apprécier ces moments de partage nous ont récompensés largement.
A côté de la partie formation, nous avons essayé d’apporter notre petite part d’amélioration dans les différents services dans lesquels nous avons travaillé.
Luc a pu mettre en place, en collaboration avec l’infirmier responsable de la chirurgie, un protocole concernant les différents matériaux de pansement de plaie, leur utilisation et leur application.
De son côté, Florence a pu accompagner les infirmières de la néonatologie dans l’utilisation des pompes à perfusion et les encourager à la pratique du Mother Kangourou Care avec les prématurés et leur maman, qui a donné lieu à de beaux moments d’échange.
Défi et ressentis
S’il y a bien un pays éloigné de l’Afrique en terme de manière de s’organiser c’est bien la Suisse. Et il nous a fallu une certaine énergie pour composer avec l’organisation Congolaise. Les premiers ateliers de réanimation ont commencé avec 1 heure de retard et la moitié des soignants n’était pas là. Au fur et à mesure que les journées avançaient, nous avons pris l’habitude d’aller chercher chacun des participants dans son service et de rappeler le prénom des personnes conviées à chaque réunion matinale. Après un peu de frustration les premiers temps nous avons appris à trouver des stratégies pour s’adapter sans s’épuiser.
Au-delà de l’apport que nous espérons que cette formation a pu donner pour l’HGR, elle nous a aussi beaucoup apporté à nous dans nos rôles de formateur. Apprendre à interagir ensemble face à des groupe tantôt disciplinés, tantôt dissipés nous a beaucoup appris. Pour Luc, cela a aussi été l’occasion d’exercer ses compétences de formateur. Pour Florence, qui donnait déjà des formations de réanimation, cela a été l’occasion de s’initier à la formation de formateurs.
Pour que la formation continue
Durant la dernière semaine d’atelier de réanimation, nous avons fait équipe avec deux infirmiers locaux, travaillant au bloc opératoire et qui ont pu donner avec nous une part des ateliers de réanimation. Nous leur avons proposé de prendre des temps de préparation ensemble puis de participer en tant que deuxième formateurs durant les ateliers. Nous avons aussi pu prendre des temps d’échange à la fin des sessions, pour leur proposer des stratégies d’amélioration dans leur rôle de formateurs. Le mannequin de réanimation est resté à Kabinda pour qu’il puisse être utilisé pour des « refresh » ou de nouveau apports au sein de l’HGR Kabinda.
Pour faire suite à la formation de réanimation nous rêverions un jour de pouvoir voir un volontaire mettre en place une formation sur les défibrillateurs et pouvoir récolter les fonds nécessaires pour fournir l’HGR en défibrillateurs semi-automatiques.
Et pour que cela ne s’arrête pas là, nous aimerions rester en contact avec les prochains volontaires qui s’envoleront pour Kabinda afin de pouvoir ensemble discuter des suites de formations continues qui pourraient être mises en place. Kabinda garde une place spéciale dans nos cœur et nous espérons pouvoir participer à pérenniser la formation continue des soignants de l’HGR.
Florence Scuderi & Luc Babando